Lettre d’information Voix des Femmes juillet 2011

 
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Chères amies, chers amis,

Bienvenue à Voix des femmes, la lettre d’information régulière de Women's Initiatives for Gender Justice. Dans Voix des femmes, nous vous fournissons des mises à jour et des analyses sur les évolutions politiques, la poursuite de la justice et de la responsabilité pénale, la participation des femmes aux pourparlers de paix et aux efforts de réconciliation, du point de vue de militants pour les droits des femmes qui se trouvent dans des situations de conflits armés, notamment dans les pays qui font l’objet d’enquêtes par la Cour pénale internationale (CPI), y compris l’Ouganda, la République démocratique du Congo (RDC), le Darfour, la République centrafricaine (RCA), le Kenya, la Libye et la Côte d’Ivoire.

En plus de Voix des femmes, nous produisons régulièrement un bulletin juridique, Panorama légal de la CPI, comprenant des résumés et des analyses de genre sur les dernières décisions judiciaires et les autres développements juridiques au sein de la Cour pénale internationale (CPI), et avec des discussions sur des questions juridiques relatives à la participation des victimes devant la CPI, d'autant plus que ces questions se rapportent à la poursuite de crimes basés sur le genre dans chacune des situations faisant l’objet d’une enquête par la CPI.

Pour de plus amples informations sur le travail de Women’s Initiatives for Gender Justice et pour les éditions antérieures de Voix des femmes et Panorama légal de la CPI, veuillez consulter notre site web www.iccwomen.org.

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Libye :: Des rapports récents pointent vers une politique gouvernementale de viol de masse dans le conflit libyen

Lors d'une conférence de presse le 16 mai 2011, le Procureur de la Cour pénale internationale, Luis Moreno-Ocampo, a annoncé qu'il avait demandé à la Chambre préliminaire I de délivrer des mandats d'arrêt à l'encontre du colonel Muammar Kadhafi, de son fils Saif Al-Islam Kadhafi et de son beau-frère et chef du renseignement Abdullah Al-Sanussi. Selon le Bureau du Procureur (BdP), ces trois individus sont les principaux responsables de crimes contre l'humanité, tels qu'allégués dans la requête du Procureur dans les mandats d'arrêt.[1] Il revient maintenant à la Chambre préliminaire de déterminer s'il existe suffisamment de preuves pour établir des « motifs raisonnables » de croire que ces crimes ont bien été commis et si les mandats d'arrêt doivent être délivrés. Bien que le Procureur n'ait pas inclus le viol comme chef d'accusation dans sa demande de mandats d'arrêt, il a déclaré qu'entre-temps le BdP continuera ses enquêtes, notamment concernant les allégations de viol.

Cette annonce survient à un moment où les allégations d'agressions sexuelles contre les femmes en Libye sont de plus en plus fréquentes, comprenant l'affaire très médiatisée d'Iman al-Obeidi,[2] et où les forces de Kadhafi sont accusées d'avoir reçu des préservatifs et des comprimés de la drogue Viagra[3] qui améliore la performance sexuelle et d'avoir été ordonnées de violer des femmes, parfois en présence de leurs familles, dans le cadre d'une politique gouvernementale visant à instiller la peur au sein de la population. Des allégations de violence sexuelle à l'encontre d'enfants et d'Africains subsahariens pris pour des mercenaires de Kadhafi ont également été rapportées.

Selon les informations fournies par une psychologue à Benghazi à la commission d'enquête internationale[4] (établie par le Conseil des droits de l'homme onusien pour enquêter sur les allégations de violations des droits humains internationaux dans la Jamahiriya arabe libyenne),[5] il y a eu 259 cas signalés d'abus sexuels sur 60 000 répondants au sondage. Bien que la commission n'ait pas confirmé la méthodologie ou les résultats de l'étude, il a souligné la nécessité d'une enquête plus approfondie sur ces crimes.

Malgré la forte médiatisation de ces allégations, il convient de noter que les enquêtes sont toujours en cours et que le Procureur n'a pas encore demandé à ce que ces accusations soient incluses dans le mandat d'arrêt. Le Bureau du Procureur tente de déterminer si les rapports de viols et de violences sexuelles peuvent être attribués à une politique ordonnée par Kadhafi ou à « quelque chose qui s'est passé dans les casernes ».[6]

Une des caractéristiques de cette affaire est la rapidité avec laquelle le Conseil de sécurité a déféré[7] la situation en Libye à la CPI (soit le 26 février, environ deux semaines après la violente répression du gouvernement à l'encontre des vives protestations) ainsi que la rapidité avec laquelle le Bureau du Procureur a mené ses investigations et a préparé les demandes de mandats d'arrestation. Beaucoup ont comparé la manière décisive avec laquelle le Conseil de sécurité a abordé le conflit en Libye et ​​la rapidité des développements à la CPI, avec d'autres situations où des rapports de présumés crimes contre l'humanité ont été sans aucune réponse de l'ONU ou de la CPI.

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RCA :: Les effets des attaques de la LRA dans le sud-est du pays

Cette année, Women's Initiatives for Gender Justice et un de ses partenaires en République centrafricaine (RCA), Jeunesse Unie pour la Protection de l'Environnement et le Développement Communautaire (JUPEDEC) – une ONG locale des droits de l'homme qui promeut le développement communautaire et qui est activement engagée dans le plaidoyer pour soutenir le retour des femmes et enfants aux mains de la Lord's Resistance Army (LRA) - lancent un projet de recherche conjoint. Cette recherche se concentrera sur les effets de la LRA sur les populations des provinces du sud-est, sur la réceptivité de la communauté envers ceux qui ont été préalablement enlevés, et sur les besoins des rapatriés, en particulier ceux des femmes et des filles qui ont été enlevées par la LRA, pour leur réhabilitation et leur réintégration.

Depuis l'atelier « Femmes, paix, justice, pouvoir » à Bangui en novembre 2009, Women's Initiatives for Gender Justice plaide auprès de la CPI pour qu'elle ouvre des enquêtes sur les crimes commis par la LRA en République centrafricaine, en RDC et au Sud-Soudan, afin de refléter la portée et l'ampleur des crimes commis par la LRA au-delà des frontières ougandaises.

En février et mars 2011, Women's Initiatives a mené une revue littéraire de plus de 20 articles, sources médiatiques et rapports sur les activités de la LRA en République centrafricaine. Contrairement à leur plateforme originale en Ouganda, la LRA n'a jamais prétendu avoir un agenda politique à l'égard de la RCA elle-même. Leur présence semble être due à la « survie » du groupe de miliciens et à une tentative d'éloigner le groupe de l'UPDF (armée ougandaise) tout en conservant une activité transfrontalière avec le Congo et une présence sûre au Soudan.

La revue littéraire analyse la chronologie de la présence de la LRA en République centrafricaine, y compris des détails de 130 attaques différentes au cours d'une période de trois ans, une analyse des modes de commission, et les effets de la LRA sur les populations locales dans ces territoires et sur ​​la région dans son ensemble. L'examen a révélé que de février 2008 à mars 2011, au moins 290 personnes ont été tuées et 874 ont été enlevées lors d'attaques menées par la LRA.[8] Ces données sont des estimations basées sur les chiffres les plus bas possible, et les nombres exacts sont sans doute beaucoup plus élevés. Il est également estimé par Oxfam International que 100 % des filles qui sont enlevées par la LRA sont violées.[9] Il faut noter qu'il y a des écarts importants entre les rapports quant au nombre de personnes attaquées et touchées par les activités de la LRA en raison des difficultés rencontrées pour accéder à ces endroits.

Il est estimé que près d'un tiers des personnes enlevées par la LRA sont des enfants qui sont enrôlés de force dans la LRA en tant que combattants et esclaves sexuels.[10] Par conséquent, une partie importante de la milice est composée d'individus qui ne font pas volontairement partie des agendas politiques ou militaires de la LRA et de leurs activités.[11] La recherche conjointe, la première du genre, mettra l'accent sur les facteurs qui peuvent dissuader ou encourager les commandants de bas niveau et de niveau intermédiaire de la LRA de considérer l'évasion ou la reddition étant donné qu'ils sont peu susceptibles d'être soumis à des poursuites à leur retour. En outre, l'expérience montre que lorsque les commandants de la LRA s'évadent ou se rendent, ils amènent souvent d'autres personnes avec eux, y compris des femmes et des enfants. La recherche portera également sur les besoins des rapatriés, en particulier ceux des femmes et des filles, quant aux défis rencontrés lors de leur réhabilitation et réintégration. L'impact de la LRA sur ces communautés sera également analysé dans le but de fournir au gouvernement de la RCA, à l'ONU et à d'autres acteurs clés des indications sur la façon de faciliter les éventuelles capitulations et le soutien requis par les rapatriés et leurs communautés.

JUPEDEC est l'une des rares organisations à aborder l'impact des attaques de la LRA sur ​​les communautés affectées, y compris sur les personnes déplacées internes (PDI) et sur les rapatriés. Dans la dernière année, JUPEDEC, avec le soutien de Conciliation Resources, du PNUD et de Women's Initiatives for Gender Justice, a organisé quatre ateliers dans les préfectures du sud-est pour les leaders des communautés locales, les déplacés internes, la société civile et des groupes de femmes, afin d'accroître les connaissances sur les défis rencontrés par les communautés affectées par la LRA et de renforcer les capacités de prévention des conflits des acteurs locaux. Bien que tous ces ateliers comprenaient des discussions sur la violence basée sur le genre et sur l'impact de la LRA sur les femmes et les filles, la réunion de Zémio, les 13 et 14 décembre 2010, était spécifiquement axée sur la participation des femmes dans les initiatives de paix dans les zones les plus touchées par la LRA. Cet atelier a réuni 77 participants, y compris des femmes victimes/survivantes de la LRA venant de régions différentes des préfectures de Mbomou et de Haut-Mbomou, des femmes congolaises réfugiées en RCA, et des membres des autorités locales.

Les témoignages des femmes victimes/survivantes ont contribué à la formulation de recommandations sur les différentes actions qui devraient être prises pour soutenir les victimes/survivantes de violence sexuelle et basée sur le genre, comme la création d'un centre pour le soutien aux victimes et leur réinsertion au sein du système socio-économique au niveau local, des programmes d'alphabétisation et activités génératrices de revenus. Des recommandations ont également été faites au sujet des activités visant à encourager le retour de ceux qui sont détenus par la LRA, y compris des programmes de radio et l'organisation de groupes de soutien pour les familles d'origine.

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RDC :: Dernières nouvelles sur les chambres foraines pour la justice pour les femmes

Du 13 avril 2011 jusqu'au début du mois de mai 2011, une chambre foraine pour la justice pour les femmes a tenu une série de procès dans le village de Kamituga, qui se trouve dans le territoire de Mwenga dans la province du Sud-Kivu à l'est du Congo. Ces procès font suite à celui tenu dans la ville de Baraka en février 2011, pendant lequel 10 soldats de l'armée congolaise régulière (FARDC) ont été condamnés pour crimes contre l'humanité pour le viol de plus de 60 femmes le jour du Nouvel An à Fizi, au Sud-Kivu.[12]

Pendant les procès à Kamituga, au cours desquels des accusations ont été portées contre des soldats et des policiers impliqués dans dix cas de viol différents, 16 victimes/survivantes sont venues témoigner devant cinq juges[13] sur les viols et violences sexuelles commis à leur encontre. Tous ces cas concernaient des incidents de violence sexuelle qui ont eu lieu dans des villages et des villes le long de la Route Nationale 2 qui, pendant plus de deux décennies, a été considérée comme une scène bien connue pour ses conflits et ses incidents violents, y compris les viols collectifs, les violences sexuelles et les meurtres de femmes. Selon les informations disponibles sur le site de l'Open Society Foundations,[14] la des cas de viols comportaient des violences sexuelles commises contre des mineurs, la plus jeune ayant 8 ans. La majorité des cas ont abouti à des peines de prison allant de trois ans (pour une affaire concernant des rapports sexuels consensuels) à 20 ans.[15]

Les victimes/survivantes de ces cas ont été accordées entre 3 000 et 10 000 USD à titre de dommages et intérêts civils. De même, les victimes/survivantes du viol de masse de Fizi avaient également été accordées 10 000 USD chacune à titre de compensation par le gouvernement congolais. Selon un des partenaires de Women's Initiatives du Sud-Kivu, Action des femmes pour le développement (AFD), aucune des victimes/survivantes n'a reçu à ce jour l'octroi d'une indemnité. L'AFD fait actuellement du plaidoyer auprès des autorités compétentes pour un suivi de cette question.

Les chambres foraines pour la justice pour les femmes sont une étape importante dans la lutte contre l'impunité pour les crimes basés sur le genre. Le nombre de victimes/survivantes témoignant devant ces tribunaux[16] montre que les femmes et les filles sont prêtes à prendre la parole lorsque l'occasion leur est offerte. Actuellement, les chambres foraines pour la justice pour les femmes n'opèrent que dans la province du Sud-Kivu.

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Soudan :: Les femmes dans les camps de déplacés au Darfour souffrent de la détérioration des conditions humanitaires et sécuritaires

Dans une mise à jour que des défenseurs locaux ont récemment fait parvenir à Women's Initiatives for Gender Justice, les femmes du Nord Darfour ont rapporté une grave détérioration des conditions humanitaires, l'absence de sécurité et l'impact négatif des mesures oppressives adoptées par le gouvernement soudanais sur leurs activités quotidiennes.

Des rapports officieux indiquent que la récente expulsion d'ONG et l'adoption de mesures par le gouvernement visant à disperser et à expulser les personnes déplacées internes (PDI) des camps dans le cadre de sa « nouvelle stratégie pour le Darfour »,[17] ont accru la pression et les souffrances des femmes au Darfour. Les conditions humanitaires se sont détériorées avec l'aide d'urgence atteignant les camps de déplacés tous les trois mois au lieu d'une fois par mois. La pénurie d'eau dans les camps a aussi donné lieu à une crise humanitaire et à des conditions sanitaires de plus en plus mauvaises.

Il est rapporté qu'en conséquence, les femmes ont dû commencer à effectuer des travaux éprouvants afin de répondre à leurs besoins fondamentaux. Cela a entraîné des accidents, parfois mortels. Le 9 mars, par exemple, deux femmes sont décédées et une autre a été blessée lors d'un accident survenu alors qu'elles creusaient des puits dans un camp de personnes déplacées. Selon une source,[18] les femmes travaillaient sur un projet d'OXFAM USA. L'organisation n'aurait pas contacté les familles de ces femmes et n'aurait pas fourni de compensation. Certaines femmes ont également recours à des activités illégales en vertu de la loi soudanaise, telles que la production et la vente d'alcool, et elles doivent faire face au harcèlement, à l'exploitation et au viol.

La situation sécuritaire est toujours extrêmement fragile et semble se détériorer. Des unités de sécurité ont recours aux détentions illégales, aux enlèvements et à d'autres crimes (dont le viol et la violence sexuelle). Ces incidents ciblent en particulier les dirigeants des PDI. La fréquence de tels incidents s'est intensifiée selon les femmes du Darfour. Le viol devient de plus en plus répandu. Plusieurs incidents ont eu lieu, notamment au début du mois de mars dans la région de Shagra où sept femmes du camp d'Abu Shouk ont été violées, et à Shangil Tobaya où cinq femmes du camp de Zamzam ont été violées. De plus, le 17 mars, une attaque menée par le gouvernement soudanais a conduit à la mort d'une femme et à la blessure d'un enfant de 13 ans.

L'arrestation de Mme Hawa Abdulla, une militante des droits des femmes bien connue et qui travaille aussi comme assistante linguistique pour la mission hybride des Nations Unies et de l'Union africaine au Darfour (UNIMAD), est un signe tangible de la détérioration de la sécurité et du fait que les forces de la sécurité nationale soudanaise continuent à cibler les femmes dirigeantes des personnes déplacées internes. Mme Hawa a été arrêtée à son domicile à Abushok près d'El Fasher le 6 mai et a été emmenée vers une destination inconnue. Il est rapporté que les forces de sécurité nationale soudanaise l'accusent de prêcher le christianisme aux enfants et de faire partie du Mouvement de libération du Soudan (MLS) d'Abdel Wahid al-Nur, un groupe rebelle qui refuse de s'asseoir à la table de négociation avec le gouvernement dans le cadre des pourparlers de paix au Darfour. Selon la législation soudanaise, prêcher le christianisme est l'équivalent du crime d'apostasie et pourrait mener à la condamnation à mort. Les défenseurs soudanais des droits des femmes et Women's Initiatives for Gender Justice sont très préoccupés par les conditions de détention de Mme Hawa, et demandent que son procès avec représentation légale soit immédiat ou qu'elle soit libérée.

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Nouvelles et opinions

RDC  La Représentante spéciale du Secrétaire général pour la violence sexuelle dans les conflits, Mme Margot Wallström, a publié une déclaration le 23 juin condamnant le viol de masse récent qui a eu lieu dans le territoire de Fizi, au Sud-Kivu.[26] Des rapports indiquent que plus de 150 femmes ont été violées les 10-11 juin dans la zone de Minembwe par les troupes du colonel Kifaru, un ex-commandant de la PARECO-Hutu qui a récemment déserté l'armée congolaise avec près de 150 soldats.[27] Bien qu'il fût absent lorsque le viol de masse a eu lieu à Fizi pendant le Nouvel An, le colonel Kifaru était le commandant du secteur militaire du bataillon de l'armée régulière responsable de cette attaque.[28] Dans sa déclaration, Mme Wallström a affirmé que l'incident de juin est un signe supplémentaire de la « persistance d'une tendance à l'indiscipline de ceux qui portent les armes, et qui se manifeste dans des actes de pillage commis en conjonction avec les viols et d'autres atteintes aux droits de l'homme. Ce qui alimente cette tendance est l'intégration rapide des ex-combattants rebelles dans les forces armées nationales, sans formation systématique ou processus de vérification. »[29] Ceci est un problème que Women's Initiatives soulève depuis juin 2009, concernant l'absence d'un mécanisme de vérification distinct et d'un réentrainement des combattants avant leur intégration dans l'armée congolaise. Cela est un des défauts des accords de paix de Goma signés entre le gouvernement congolais et un nombre de groupes de milices, y compris le CNDP et le PARECO, en mars 2009. Women's Initiatives et ses partenaires ont critiqué ces aspects des accords de paix, ainsi que l'application éventuelle de la clause d'amnistie pour les crimes basés sur le genre. Ces préoccupations ont été transmises au Secrétaire général de l'ONU en juin 2009 dans une lettre ouverte de la part de Women's Initiatives et de ses partenaires dans l'est de la RDC, représentant plus de 180 organisations locales de femmes et de droits de l'homme. En apprendre davantage dans le numéro d'avril 2011 de Voix de femmes.

Côte d'Ivoire  Le 23 juin, le Procureur de la CPI a demandé l'autorisation d'ouvrir des enquêtes sur les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité commis en Côte d'Ivoire.[30] Bien que le pays soit soumis à une enquête préliminaire par le Bureau du Procureur depuis le 1er octobre 2003, une recrudescence de la violence suite à l'élection présidentielle du 28 novembre 2010 a conduit le Procureur à se pencher de nouveau sur la situation.[31] Plus récemment, le 3 mars, au moins six femmes qui manifestaient paisiblement pour appuyer Alassane Ouattara (internationalement reconnu vainqueur des élections de novembre) ont été abattues par des soldats soutenant l'actuel président Gbagbo.[32] Chassé du pouvoir le 11 avril 2011, Gabgbo est actuellement en résidence surveillée dans une habitation présidentielle au nord dans la ville de Korhogo.[33] Dans un rapport rendu public le 10 juin, une commission d'enquête établie par le Conseil des droits de l'homme de l'ONU a signalé qu'il y avait des preuves de crimes contre l'humanité éventuellement commis par les forces de Gbagbo et par les adeptes de son successeur Ouattara. Les résultats ont été analysés par le Conseil des droits de l'homme de l'ONU le 15 juin.[34]

RDC  Le 28 avril, la Cour supérieure du Québec a statué que l'affaire contre la société Anvil Mining Limited pouvait procéder à la prochaine étape et a rejeté la tentative de la société pour que l'affaire soit jetée ou pour qu'elle soit jugée en République démocratique du Congo, lieu des faits, ou en Australie, car la société appartenait à l'Australie au moment de l'incident. La société est accusée d'avoir fourni un soutien logistique à l'armée congolaise et d'avoir ainsi contribué à des violations des droits de l'homme, notamment en ce qui concerne le massacre du peuple de Kilwa en 2004 au cours duquel plus de 70 civils sont décédés. La Cour doit maintenant déterminer si l'affaire doit être certifiée en tant que recours collectif, permettant à tous ceux qui ont souffert à Kilwa de porter plainte contre Anvil Mining. Une audience sur la certification du litige est prévue en juin. L'affaire a été portée par l'Association canadienne contre l'Impunité (ACCI), qui représente les survivants et les familles des victimes du massacre et les réunit avec les représentants d'organisations non gouvernementales britanniques, canadiennes et congolaises qui les soutiennent.[35]

Kenya  Dans un article publié par le site de nouvelles IRIN le 25 avril,[36] Women's Initiatives for Gender Justice s'est dite préoccupée par une décision de la CPI refusant de reconnaître la circoncision forcée à l'encontre des hommes comme une forme de violence sexuelle dans le procès concernant le Kenya.[37] Brigid Inder, la directrice exécutive, a déclaré que « ces actes constituent une forme de violence sexuelle en raison de la force [utilisée] et l'environnement coercitif, ainsi que l'intention et le but des actes.  ... la circoncision forcée des hommes Luo a à la fois une signification politique et ethnique au Kenya et a donc une signification particulière. Dans ce cas, elle se voulait l'expression d'une domination politique et ethnique d'un groupe sur l'autre et était destinée à diminuer l'identité culturelle des hommes Luo. » Dans l'article, Women's Initiatives demande au Bureau du Procureur de bien plaider la cause pour que la circoncision forcée soit reconnue comme une forme de violence sexuelle, en prenant en compte ces questions.

Kenya  Le 30 mars 2011, Women's Initiatives for Gender Justice a tenu une conférence de presse à Nairobi pour discuter de la justice pour les femmes et de la responsabilité pénale, à la fois dans le contexte du Kenya et à l'échelle internationale. La conférence de presse a été suivie par 30 membres de la presse kenyane. Parmi les orateurs figuraient Brigid Inder, directrice exécutive de Women's Initiatives for Gender Justice, en tant que modératrice ; Betty Murungi, membre du conseil de la Commission kenyane des droits de l'homme (Kenya) ; Michael Wachira, directeur adjoint du Centre for Rights Education and Awareness (CREAW - Kenya) ; Alexis Mbolinani, coordinateur de Jeunesse Unie pour la Protection de l'Environnement et le Développement Communautaire (JUPEDEC - République centrafricaine) ; Stella Yanda, secrétaire exécutive d'Initiatives Alpha (RDC) ; et Amira Kahir, chargée de programme pour le Soudan pour Women's Initiatives for Gender Justice. Un rapport complet en anglais sur la conférence de presse est disponible ici.

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1   « Selon le Procureur de la CPI, Kadhafi a usé de son pouvoir absolu pour commettre des crimes en Libye », Cour pénale internationale, mai 2011, disponible à http://www.icc-cpi.int/NR/exeres/1365E3B7-8152-4456-942C-A5CD5A51E829.htm, dernièrement consulté le 30 mai 2011.
2   Iman al-Obeidi, une femme libyenne de 28 ans, a prétendu qu'elle a été battue et violée pendant deux jours par 15 hommes du colonel Muammar Kadhafi. Elle a fait la une des médias internationaux lorsqu'elle a fait irruption dans un hôtel à Tripoli afin de révéler son histoire à une salle remplie de journalistes, tout en se débattant contre les menaces verbales et physiques du personnel de l'hôtel.
3   ‘Strong proof of Libya crimes against humanity: ICC', Reuters, 2 mai 2011, disponible à http://www.reuters.com/article/2011/05/02/us-libya-warcrimes-idUSTRE7417VU20110502, dernièrement consulté le 30 mai 2011.
4   'Report of the international commission of inquiry to investigate all alleged violations of international law in the Libyan Arab Jamahiriya', Conseil des droits de l'homme de l'ONU, 1er juin 2011, disponible à http://www.unhcr.org/refworld/docid/4df74f402.html, dernièrement consulté le 28 juin 2011.
5   En raison de l'actuel conflit libyen, il y a deux parties en lice pour la gouvernance du pays qui réfèrent à l'état par des noms différents: le gouvernement de Kadhafi l'appelle la Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire et socialiste et le Conseil national de transition (formé par les forces anti-Kadhafi) s'y réfère en tant que la République libyenne.
6   ‘Libya: Gaddafi investigated over use of rape as weapon', BBC, 8 June 2011, disponible à http://www.bbc.co.uk/news/world-africa-13705854, dernièrement consulté le 23 juin 2011.
7   Résolution 1970, Conseil de sécurité des Nations Unies, 6491e séance, S/RES/1970 (2011), 26 février 2011, par. 4-8, disponible à http://www.un.org/News/Press/docs/2011/sc10187.doc.htm, dernièrement consulté le 22 juin 2011.
8   Chiffres compilés par Women's Initiatives for Gender Justice sur la base de rapports disponibles.
9   ‘Ghosts of Christmas Past, Protecting Civilians from the LRA, Joint NGO Briefing Paper', Oxfam International, décembre 2010, disponible à http://www.oxfam.org/sites/www.oxfam.org/files/lra-ghost-christmas-past-20101214.pdf, dernièrement consulté le 1er juillet 2011.
10   ‘CAR/DR Congo: LRA Conducts Massive Abduction Campaign 2010', Human Rights Watch, août 2010, disponible à http://www.hrw.org/en/news/2010/08/11/cardr-congo-lra-conducts-massive-abduction-campaign, dernièrement consulté le 30 mai 2011.
11  ‘A Vision for Advancing Gender Justice, 2010-2012', document interne de Women's Initiatives for Gender Justice.
12   Pour plus de détails sur le procès de Baraka et les chambres foraines pour la justice pour les femmes, voir le numéro du mois d'avril 2011 de Voix des femmes.
13   La magistrature assise comprenait un fonctionnaire de police et les autres étaient des officiers militaires.
14   ‘Congo Justice: Series of dispatches', Chuck Sudetic, Open Society Foundations, avril 2011, disponible à http://blog.soros.org/author/chuck-sudetic/, dernièrement consulté le 30 mai 2011.
15   Ibidem.
16   Pendant le procès de Baraka, 49 victimes/survivantes ont témoigné sur le viol de masse de Fizi, et le procès plus récent de Kamituga a vu défiler les témoignages de 16 victimes/survivantes.
17   Voir l'édition d'avril 2011 de Voix des femmes.
18   La source tient à rester anonyme en raison de la surveillance intense par le Gouvernement soudanais des communications entre les acteurs et ONG locaux et internationaux.
19   Site web officiel de la commission d'enquête internationale, disponible à http://www.k-ic.org/.
20   Report Of The Independent International Commission Of Inquiry Into The Events In Southern Kyrgyzstan In June 2010', Kyrgyzstan Inquiry Commission, disponible à http://www.k-ic.org/images/stories/kic_report_english_final.pdf, dernièrement consulté le 30 mai 2011.
21   ‘Kyrgyzstan-Tajikistan: Clashes on Volatile Border Growing Vicious', Alisher Khamidov, Eurasianet.org, avril 2011, disponible à http://www.eurasianet.org/node/63336, dernièrement consulté le 30 mai 2011.
22   ‘Kyrgyzstan: New Evidence Emerges on Brutality of Attacks', Human Rights Watch, juin 2010, disponible à http://www.hrw.org/en/news/2010/06/25/kyrgyzstan-new-evidence-emerges-brutality-attacks, dernièrement consulté le 30 mai 2011.
23   ‘Report of the Independent International Commission of Inquiry into the Events in Southern Kyrgyzstan In June 2010', Kyrgyzstan Inquiry Commission, p xi, 133, 149, 158, 166, 177, 193, 216, 217, 218, disponible à http://www.k-ic.org/images/stories/kic_report_english_final.pdf, dernièrement consulté le 30 mai 2011.
24   Ibidem, p ii, 6 disponible à http://www.k-ic.org/images/stories/kic_report_english_final.pdf, dernièrement consulté le 30 mai 2011.
25   ‘Comments by the Government of Kyrgyzstan in response to the report of the Kyrgyzstan Inquiry Commission into the events in southern Kyrgyzstan in June 2010', Gouvernement du Kirghizistan, p 80, disponible à http://www.k-ic.org/images/stories/kg_comments_english_final.pdf, dernièrement consulté le 30 mai 2011.
26   ‘UN envoys voice outrage after mass rape in eastern DR Congo', UN News Centre, 24 juin 2011, disponible à http://www.un.org/apps/news/story.asp?NewsID=38843&Cr=sexual+violence&Cr1, dernièrement consulté le 27 juin 2011. See also ‘Fizi: viols massifs à Nyakiele, 70 victimes en une nuit', Radio Okapi, 22 June 2011, 22 juin 2011, disponible à http://radiookapi.net/actualite/2011/06/22/fizi-viols-massifs-a-nyakiele-70-victimes-en-une-nuit/, dernièrement consulté le 23 juin 2011.
27   ‘Troubles in the Integration of Armed Groups', Blog Post on AllAfrica, 15 juin 2011, disponible à http://blogafrica.allafrica.com/view/entry/main/main/id/0Cy601mWI9J2eTE7.html, dernièrement consulté le 23 juin 2011.
28   ‘DR Congo Mass rape in Fizi: 170 attacked', BBC, 24 June 2011, disponible à http://www.bbc.co.uk/news/world-africa-13910875, dernièrement consulté le 27 juin 2011.
29   ‘UN envoys voice outrage after mass rape in eastern DR Congo', UN News Centre, 24 June 2011, 24 juin 2011, disponible à http://www.un.org/apps/news/story.asp?NewsID=38843&Cr=sexual+violence&Cr1, dernièrement consulté le 27 juin 2011.
30   ‘Cote d'Ivoire: ICC Prosecutor ready to request judges for authorization to open an investigation', ICC, 22 juin 2011, disponible àt http://www.icc-cpi.int/NetApp/App/MCMSTemplates/Content.aspx?
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, dernièrement consulté le 23 juin 2011.
31   Côte d'Ivoire, Site web officiel de la CPI, disponible à http://www.icc-cpi.int/Menus/ICC/Structure+of+the+Court/Office+of+the+Prosecutor/Comm+and+Ref/C%C3%B4te+dIvoire/, dernièrement consulté le 30 mai 2011.
32   ‘Ivorian women protesters killed', Al Jazeera, 5 mars 2011, disponible à http://english.aljazeera.net/video/africa/2011/03/20113551020308848.html#, dernièrement consulté le 30 mai 2011.
33   ‘Gbagbo calls for peace in Ivory Coast', Al Jazeera, 3 mai 2011, disponible à http://english.aljazeera.net/news/africa/2011/05/2011534840931838.html, dernièrement consulté le 20 juin 2011.
34   ‘UN probes crimes against humanity in I. Coast', AFP, 0 juin 2011, disponible à http://www.google.com/hostednews/afp/article/ALeqM5jtnKlCMHwtcl7qSzunnXtTdF0zdw?docId=
CNG.f0cf4e201117b4e64ed 6d628597c40b1.1f1
, dernièrement consulté le 20 juin 2011.
35   ‘Congolese victims file class action against Canadian mining company', Global Witness, 8 novembre 2010, disponible à http://www.globalwitness.org/library/congolese-victims-file-class-action-against-canadian-mining-company, dernièrement consulté le 20 juin 2011; et ‘Court ruling a major step forward for case against Canadian mining company', Global Witness, 28 avril 2011, disponible à http://www.globalwitness.org/library/court-ruling-major-step-forward-case-against-canadian-mining-company, last visited on 20 June 2011.
36  « Forced Circumcision – a Form of Sexual Violence », Women's Initiatives for Gender Justice, mai 2011, disponible à http://www.iccwomen.org/news/berichtdetail.php?we_objectID=104, dernièrement consulté le 30 mai 2011.
37   Le Procureur c. Francis Kirimi Muthaura, Uhuru Muigai Kenyatta et Mohammed Hussein Ali.
 

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Autour du monde

Kirghizistan  Le 3 mai 2011, une commission d'enquête internationale indépendante (la Kyrgyzstan Inquiry Commission – KIC)[19] a publié un rapport[20] sur les événements qui ont secoué le sud du Kirghizistan en juin 2010. Environ 470 Ouzbeks et Kirghizes ont été tués dans des affrontements ethniques et politiques dans les provinces d'Osh et Jalal-Abad dans le sud du pays,[21] et de nombreuses allégations de viol ont été signalées.[22]

Dans son histoire récente, ce pays d'Asie centrale a connu deux changements de pouvoir majeurs, d'abord en 2005 puis en avril 2010. Dans ces deux cas, les anciens présidents sont actuellement en exil. Cette crise politique d'avril 2010 a déclenché la violence ethnique dans le sud qui a atteint son plus haut niveau entre le 10 et le 14 juin 2010.

Le rapport de la commission d'enquête internationale est actuellement au centre de discussions politiques en Kirghizistan. Dans le rapport, la KIC confirme une vingtaine de viols et d'autres incidents de violence sexuelle, mais reconnaît que le chiffre réel pourrait être beaucoup plus élevé.[23] La commission mentionne également le fait que les femmes continuent à souffrir de violences sexuelles et basées sur le genre, et dans les rares cas où les victimes ont choisi de déposer une plainte pour viol, la commission constate que la réponse des autorités a été ‘insuffisante voire obstructive'.[24]

Le soutien insuffisant aux victimes/survivantes de violence sexuelle par les autorités de police et le système judiciaire dans ce pays d'Asie centrale est également confirmé et rapporté par le partenaire kirghize de Women's Initiatives, le Women's Support Center. Selon ce dernier, les événements de juin 2010 auront des conséquences durables sur le Kirghizistan et les droits des femmes dans le pays. « La situation demeure instable », a dit la directrice exécutive du Women's Support Centre, Aigul Alymkulova. « Malgré les efforts de paix du gouvernement et de nombreux groupes de la société civile, il y a un haut risque pour la résurgence de conflits pouvant impliquer des civils et des unités armées. Nous sommes préoccupées en tant que citoyennes et femmes activistes par l'attention insuffisante et continuellement amoindrie accordée par les décideurs kirghizes aux questions de genre et à la détérioration des droits des femmes. Une militarisation croissante pourrait provoquer des niveaux plus élevés de violences à l'encontre des femmes et un déplacement des populations », a-t-elle dit. Le Women's Support Center souligne comment dans cette situation instable « les activistes et les ONG pour les droits des femmes doivent soigneusement élaborer des stratégies afin d'assurer que des réponses ad hoc et sur-le-champ aux défis immédiats ne nuisent pas aux approches stratégiques d'élaboration de programmes».

Dans sa réponse au rapport, le gouvernement kirghize s'est engagé à « prendre toutes les mesures nécessaires pour accélérer la découverte et l'instruction des affaires pénales, à éliminer l'approche discriminatoire de la justice, tout en se concentrant sur les cas de torture, de violence sexuelle et de transfert d'armes par l'armée et la police ».[25] Cependant, à la fin mai, à la suite de la publication et des discussions autour du rapport de la commission d'enquête internationale, le parlement kirghize a déclaré Kimmo Kiljunen, le chef de la KIC, ‘persona non grata'.

 

 

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