Août 2014 |
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Women’s Initiatives for Gender Justice est une organisation internationale de défense des droits des femmes militant pour la justice pour les femmes, comprenant l’inclusion des crimes basés sur le genre, dans les enquêtes et les poursuites judiciaires de la Cour pénale internationale (CPI) et dans les mécanismes nationaux, y compris les négociations de paix et les processus de justice. Nous travaillons avec les femmes plus touchées par les situations de conflit qui font l’objet d’une enquête de la CPI. Women’s Initiatives for Gender Justice a des programmes en Ouganda, en RDC, au Soudan, en République centrafricaine, au Kenya, en Libye et au Kirghizistan. Bureaux |
Chères amies, chers amis,Bienvenue au deuxième de deux numéros spéciaux de Voix de femmes consacrés à la situation en République centrafricaine (RCA). Voix des femmes est la lettre d’information régulière de Women's Initiatives for Gender Justice. Dans Voix des femmes, nous fournissons des mises à jour et des analyses sur les évolutions politiques, la poursuite de la justice et de la responsabilité pénale, la participation des femmes aux pourparlers de paix et aux efforts de réconciliation, et ce, du point de vue de militants pour les droits des femmes qui se trouvent dans des situations de conflits armés, notamment dans les pays qui font l’objet d’enquêtes par la Cour pénale internationale (CPI), y compris l’Ouganda, la République démocratique du Congo (RDC), le Darfour, la République centrafricaine (RCA), le Kenya, la Libye, la Côte d’Ivoire et le Mali. Ce deuxième numéro spécial s’intéresse à la réponse internationale au conflit en RCA, y compris l’autorisation de déploiement d’une force de maintien de la paix des Nations Unies en RCA, la création d’une commission d’enquête internationale, ainsi que l’ouverture d’un nouvel examen préliminaire par la Procureure de la CPI. Le premier numéro spécial sur la RCA a fourni un aperçu des événements depuis décembre 2012, un résumé des violations du droit international humanitaire et des droits humains, y compris la violence sexuelle, qui se poursuivent toujours, ainsi que des déclarations de la société civile à propos du conflit. En plus de Voix des femmes, nous produisons régulièrement un bulletin juridique, Panorama légal de la CPI, comprenant des résumés et des analyses de genre sur les dernières décisions judiciaires et les autres développements juridiques au sein de la CPI, ainsi que des discussions sur des questions juridiques relatives à la participation des victimes devant la CPI, notamment lorsque ces questions se rapportent à des poursuites intentées pour des crimes basés sur le genre dans chacune des situations faisant l’objet d’une enquête par la CPI. Pour de plus amples informations sur le travail de Women’s Initiatives for Gender Justice et pour les éditions antérieures de Voix des femmes et Panorama légal de la CPI, veuillez consulter notre site web iccwomen.org. Création d’une force de maintien de la paix des Nations Unies en RCALe récent conflit en RCA, qui aurait commencé en décembre 2012, a fait l’objet d’une série de résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies (CSNU), adoptées à l’unanimité. Entre autres mesures, les résolutions ont recommandé la création de missions de soutien par l’Union africaine (UA), la France et l’Union européenne (UE). La résolution 2121, adoptée le 10 octobre 2013, appelle à la création de la « Mission internationale de soutien à la Centrafrique sous conduite africaine », appelée MISCA, et mentionne « la possibilité de transformer celle-ci en une opération de maintien de la paix des Nations Unies ».[1] Le 5 décembre 2013, le CSNU a adopté la résolution 2127, autorisant le déploiement de la MISCA avec le soutien additionnel des forces françaises, imposant un embargo sur les armes pour une période d’un an, et demandant la création d’une commission d’enquête internationale sur la RCA qui sera examinée ci-dessous.[2] Le 28 janvier 2014, le CSNU a adopté la résolution 2134, autorisant le déploiement de troupes de l’UE en sus des 5000 Casques bleus de l’UA et des 1600 soldats français.[3] Le 14 avril 2014, s’appuyant sur ses résolutions précédentes concernant la RCA, le CSNU a adopté la résolution 2149 créant la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine (MINUSCA) pour une période initiale d’un an. En vertu de cette résolution, la MINUSCA sera composée de 10 000 hommes et le transfert de responsabilités de la MISCA à la MINUSCA s’effectuera le 15 septembre 2014.[4] Les tâches prioritaires du mandat de la MINUSCA incluent : la protection des civils ; l’appui à la mise en œuvre de la transition ; la facilitation de l’acheminement de l’aide humanitaire ; la promotion et la protection des droits de l’homme ; l’action en faveur de la justice nationale et internationale et de l’état de droit ; l’appui à la mise en œuvre de programmes de désarmement, démobilisation, réintégration et rapatriement.[5] La résolution 2149 fait directement référence aux résolutions précédentes du CSNU sur les femmes, la paix et la sécurité, et elle appelle à l’interdiction de la violence envers les femmes et les enfants ainsi qu’à leur protection. Elle demande à toutes les parties au conflit de prendre des engagements précis visant à « interdire expressément toutes violations et sévices commis contre des enfants [y compris le recrutement, l’emploi, le viol et la violence sexuelle] » et à interdire expressément « toute violence sexuelle et sexiste ».[6] La résolution 2149 demande également aux autorités de transition de prendre des engagements pour que des enquêtes sur ces crimes soient ouvertes afin d’amener les auteurs à répondre de leurs actes et de « permettre aux victimes de violences sexuelles d’accéder immédiatement aux services disponibles ».[7] Dans le mandat de protection des civils qu’elle accorde à la MINUSCA, la résolution 2149 prévoit des mesures de protection particulières, y compris le déploiement de conseillers pour la protection de l’enfance et de conseillers pour la protection des femmes.[8] Le mandat de promotion et protection des droits de l’homme de la MINUSCA stipule que cette dernière doit surveiller les violations et concourir aux enquêtes, en accordant une attention particulière aux « violations et sévices commis contre les femmes et les enfants, y compris toutes les formes de violences sexuelles ».[9] La résolution demande également à la MINUSCA de « tenir pleinement compte, dans tous les aspects de son mandat, de la question transversale que constitue la problématique hommes-femmes et d’aider les autorités de transition à garantir la contribution, la participation et la représentation pleine et effective des femmes dans tous les domaines et à tous les niveaux, y compris dans les activités de stabilisation, la réforme du secteur de la sécurité et les opérations de désarmement, démobilisation et réintégration, et rapatriement, ainsi que dans le dialogue politique national et les consultations électorales ».[10] Malgré ces résolutions, l’ONU a fait l’objet de critiques sévères en 2013 pour ne pas avoir répondu adéquatement à la crise. Dans une lettre ouverte du 12 décembre 2013, l’organisation médicale internationale MSF a critiqué l’ONU pour ses « résultats inacceptables » et pour son manque d’actions concrètes.[11] Dans la lettre, l’organisation a déclaré que « MSF déplore la performance désastreuse des agences humanitaires de l’ONU et rappelle à celles-ci leur responsabilité en matière de mobilisation et de coordination d’une action efficace et basée sur des principes, de défense des droits des personnes dans le besoin et de recherche de solutions durables à la crise actuelle ».[12] La lettre de MSF a également recommandé une enquête indépendante « afin de mieux comprendre les raisons de tels échecs et de s’assurer que les leçons en seront tirées pour le futur ». ■ Lire les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies 2121; 2127; 2134; et 2149 Commission d’enquête internationale sur la RCAUne commission d’enquête internationale (CEI) a été créée en janvier 2014 en vertu de la résolution 2127 du Conseil de sécurité, adoptée en décembre 2013. La CEI a reçu le mandat suivant : « enquêter immédiatement sur les informations faisant état de violations du droit En mars 2014, la CEI devait effectuer sa première visite en RCA, visiter Bangui, ainsi que l’intérieur du pays. Les commissaires ont déclaré qu’ils allaient enquêter sur [Traduction] « l’étendue et la gravité des violations des droits » et avoir des entretiens avec des « victimes de sévices, témoins de crimes, dirigeants politiques et chefs de villages » ainsi que « toute personne qui aidera à faire la lumière sur les meurtres, viols, disparitions et autres violations commises contre la population civile ».[14] Le 17 juin 2014, la CEI a envoyé une lettre au président du CSNU par l’entremise du Secrétaire général des Nations Unies, l’avisant que la publication de son rapport préliminaire serait retardée.[15] La lettre affirmait que les commissaires venaient tout juste de revenir d’une visite de la RCA d’une durée de deux semaines, et qu’ils croyaient que [Traduction] « certaines parties du rapport devaient être révisées » pour tenir compte de nouvelles réalités sur le terrain et pour garantir un « rapport complet et juste ». Le 2 juillet 2014, la CEI aurait rencontré la délégation de l’UE et les missions de ses États membres à Genève, avant de soumettre son rapport préliminaire au CSNU. Le rapport préliminaire « présente les résultats de l’enquête réalisée d’avril à mai 2014 et conclue qu’il existe de nombreuses preuves de violations graves et continues du droit international humanitaire et des droits humains en RCA, de janvier 2013 jusqu’à [maintenant] ». Au moment de la publication de ce numéro spécial, le rapport préliminaire n’avait pas été rendu public. Mission commune ONU Femmes–UA en RCADu 24 au 26 mai 2014, Phumzile Mlambo-Ngcuka, directrice exécutive d’ONU Femmes, et Bineta Diop, Envoyée spéciale pour les femmes, la paix et la sécurité auprès de l’UA, ont visité la RCA lors d’une mission commune qui a comporté des rencontres avec le président et de hauts fonctionnaires du gouvernement, ainsi qu’avec le groupe consultatif de femmes de haut niveau (High-Level Women’s Advisory Group) de la RCA, 17 organisations de la société civile, 16 groupes de femmes et des personnes déplacées.[16] Le but de la visite était de [Traduction] « faire connaître le sort des femmes et des filles, veiller à ce que les questions de genre soient abordées dès le départ par la nouvelle mission des Nations Unies, ainsi que de promouvoir la participation et le leadership des femmes en ce qui concerne la réconciliation locale, les dialogues nationaux, la justice transitionnelle et les prochaines élections ».[17] Dans son rapport suivant au CSNU, Mme Mlambo-Ngcuka a confirmé que la situation des femmes et des filles en RCA était très difficile, le besoin urgent en matière de [Traduction] « sécurité et d’état de droit, de santé, de nourriture et d’écoles », ainsi que le grave problème de sous-financement de l’appel humanitaire actuel.[18] ■ Lire la déclaration de Phumzile Mlambo-Ngcuka, directrice exécutive d’ONU Femmes, au CSNU (en anglais) ici La CPI ouvre une deuxième situation en RCALa RCA est un État Partie au Statut de Rome depuis 2001 et une enquête y a été ouverte en 2007 relativement à la violence commise en 2002-2003. Depuis que des hostilités y ont commencé en décembre 2012, la Procureure de la CPI, Fatou Bensouda, a publié des déclarations en mars, avril et août 2013 sur l’aggravation de la violence en RCA. Le 9 décembre 2013, la Procureure a publié une déclaration dans laquelle elle faisait part de sa préoccupation face aux « crimes graves qui continueraient d’y être perpétrés » et « exhort[ait] toutes les parties impliquées dans le conflit (notamment les anciens éléments de la Séléka et d’autres milices telles que les anti-balaka) à cesser les attaques contre la population civile et les crimes, ou risquer d’être visées par une enquête et d’être poursuivies par [son] Bureau ».[19] Le 7 février 2014, La Procureure Bensouda a annoncé que son bureau ouvrait un examen préliminaire sur la RCA, soulignant que les allégations de crimes commis dans ce pays « concernent des centaines de meurtres, des actes de viol et d’esclavage sexuel, la destruction de biens, des pillages, des actes de torture, des déplacements forcés ainsi que le recrutement et l’utilisation d’enfants dans les hostilités ».[20] La Procureure a affirmé que ces récentes allégations visant la période depuis septembre 2012 constituaient une nouvelle situation, distincte de celle qui avait été déférée à la CPI en 2004. Elle a déclaré que, en coordination avec l’UA et l’ONU, son Bureau allait « concentrer son action sur la collecte et l’analyse de toutes les informations nécessaires pour déterminer s’il existe une base raisonnable pour ouvrir une enquête s’agissant de cette nouvelle situation » tout en consultant « les autorités centrafricaines afin de discuter des modes et moyens par lesquels les auteurs de crimes seront amenés à rendre des comptes, y compris à l’échelle nationale ». ■ Lire la déclaration de la Procureure sur le deuxième renvoi par le gouvernement de la RCA ■ Lire la lettre du gouvernement de la RCA à la Procureure de la CPI ■ Lire la déclaration de la Procureure concernant l’ouverture d’un nouvel examen préliminaire en RCA Nomination de Jeannine MabundaLe 9 juillet 2014, le président de la République démocratique du Congo (RDC) Joseph Kabila a nommé un Conseiller Spécial du Chef de l’Etat en matière de lutte contre les violences sexuelles et le recrutement d’enfant. Les membres de la communauté internationale ont salué cette annonce. Dans une déclaration commune, la Représentante spéciale du Secrétaire général sur les violences sexuelles en conflit, Zainab Hawa Bangura, et la Représentante spéciale du Secrétaire général pour les enfants et les conflits armés, Leila Zerrougui, ont déclaré: ‘Cette nomination démontre l’engagement personnel du président Kabila à lutter contre la violence sexuelle liée aux conflits et le recrutement et l’utilisation d’enfants en RDC’. La création du poste qui a été attribué à Jeannine Mabunda Lioko Mudiayi, est le premier de ce genre et est considéré comme une innovation majeure dans le soutien en matière de responsabilité pour des crimes de violence sexuelle et le recrutement d'enfants. La nomination fait suite à une déclaration faite par le président Kabila en octobre 2013 après la séance de clôture d'un forum national sur le renforcement de la cohésion nationale. A cette occasion, le président Kabila avait indiqué son intention de créer un tel poste afin de s'assurer que la RDC devienne ‘une terre inhospitalière’ pour ces crimes odieux. Les partenaires de Women’s Initiatives for Gender Justice en RDC ont salué la nomination d'une femme à ce poste. Ils ont en outre indiqué que Mabunda est parfaitement compétente, en soulignant son ancien rôle de ministre du portefeuille. Joséphine Malimukono, directrice de la Ligue pour la Solidarité Congolaise: ‘Mabunda a grandement contribué à l’égalité des genres, au niveau des Ministères et du Parlement. Par exemple, elle a initié une pétition de sanctionner les hommes qui huaient les femmes à chaqu'une de leur interventions. Personnellement, nous avons travaillé avec Mabunda dans le cadre de lutte contre la violence envers les femmes. Elle organise d’ici novembre 2014 une conférence internationale sur la mémoire pour les femmes victimes des violences et un monument sera érigé.’ Emérite Tabisha Mongelwa, point focal Sud-Kivu de Women’s Initiatives for Gender Justice et coordinatrice à l’Action des Femmes pour le Droit et le Développement: ‘Mabunda était très appréciée dans ses fonctions de ministre du portefeuille. Notre souhait est qu'elle se mette à son nouveau rôle de coeur de femme compétente comme elle a été dans leur gouvernement.’ Jeanine Bandu, point focal Nord-Kivu de Women’s Initiatives for Gender Justice et coordinatrice à l’ Encadrement des Femmes Indigènes et des Ménages vulnérables: ‘Nous pensons qu'avec ses expériences dans la promotion du genre, elle mènera bien ses nouvelles fonctions.’ Cependant, certains partenaires en RDC ont exprimé leurs préoccupations que la nomination a été politiquement motivée et ont remarqué que Mme Mabunda n'a pas une longue expérience ou de l'expertise reconnue dans le domaine de la violence sexuelle et les droits des enfants. Claudine Bela Badeaza, point focal Province Orientale de Women’s Initiatives for Gender Justice et directrice du Centre d’Education et de Recherche pour le Droit des Femmes: ‘Nous nous attendions à ce que cette nomination porte sur une femme très impliquée dans la lutte contre les violences sexuelles et la protection de l'enfant, particulièrement une femme de la société civile. Nous souhaitions que cette fonction soit plus professionnelle, plutôt qu'une responsabilité formellement politique. Nos autorités développent toujours des stratégies pour avoir une mainmise sur tous les appuis extérieurs et faire voir à la communauté internationale qu'il y a du sérieux dans le travail qui se fait. Il y a toujours eu des fonds affectés dans la lutte contre les violences sexuelles en RDC, mais les résultats sur le terrain n'ont jamais été satisfaisants.’ Stella Yanda Bililo, secrétaire exécutive de l’Initiatives Alpha: ‘Je suis au courant des charges que Mabunda a exercées depuis la transition, au sein du parlement et du ministère du portefeuille mais je n'ai aucune information sur son engagement dans la lutte pour la cause des femmes et des enfants. La nomination ne doit pas être une prime ou une faveur entre cadres d'un même parti politique. C'est pour cette raison que nous attendons qu'elle nous livre sa politique, son plan d'action ou ses stratégies pour bien mener cette lutte.’
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1 S/RES/2121, par 22.
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